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TRANSSIBERIEN : UN VOYAGE INOUBLIABLE EN TRAIN

 

Le drame !

(depuis le temps que je vous le promettais...)

dernière gare de MongolieLe train ralentit et s'arrête dans la dernière gare de Mongolie. Visiblement, les gens sont pauvres ici. De nombreux petits tas de produits --boissons en particulier-- sont disposés le long du quai, en attente d'un hypothétique acheteur. On ne nous propose pas de sortir du train : des gardes montent à bord et nous remettent un n-ième formulaire de douane. Seb connait maintenant son numéro de passeport par coeur, à force de l'écrire sur tous ces documents ! Le coucher de soleil donne à cette gare une fausse impression de beauté. Pourtant, on est loin des canons de l'esthétique : quelques bâtiments en béton, trois voies et une brassée de lampadaires, fin du listing. Pas vraiment de quoi s'enthousiasmer à outrance.

Pour ma part, je suis pourtant assez excité, mais je pense que c'est l'approche de la Chine et du changement d'essieux qui me titille. Je dégaine mon appareil photo et je prends quelques clichés de la gare, de son espèce de tour-horloge, des quelques badauds et militaires présents. Tout à coup, j'entends un coup de sifflet et un cri. Je constate alors que ces éruptions sonores sont dévolues à mon attention. Une garde, au bas de ma fenêtre, me fait comprendre par gestes qu'il ne faut pas faire de photos. Pour éviter un drame --vous voyez qu'il y en a bien failli y en avoir un au cours de cette histoire-- je range l'objet du litige. On sent qu'on approche d'une frontière sensible.

coucher de soleil dans la gare frontière sino-mongolePhoto : à droite, coucher de soleil dans la gare frontière sino-mongole. Source : Seb.

Les formulaires d'entrée en Chine sont également assez démonstratifs du régime dictatorial qui nous attend. Des questions portant sur "l'importation" de drogue, d'armes ou d'appareils électroniques ou radio --bin voyons on a des soutes pleines de produits et on est ici pour le business c'est évident-- font que quand on a commencé à cocher "non" aux premiers on continue sans trop se poser de questions. Dans un sens, ça me rappelle les formulaires pour les Etats-Unis --un modèle de crétinisme avancé là aussi-- où on vous demande à la suite si vous êtes un criminel de guerre condamné par un tribunal international, un terroriste ou si vous importez des pommes. Cherchez l'erreur...

Mais pour en revenir à nous, les douaniers font les vérifications qui maintenant nous sont habituelles, et le train repart. Il fait nuit noire maintenant. Des militaires surveillent le dessous de train qui part avec des lampes. La gare s'éloigne, et le train avance maintenant en direction de la Chine. Je cherche du regard des barbelés, des bunkers. Je suppose que la zone est bourrée de mines antipersonnelles et antichars, de systèmes perfectionnés de détection et d'hommes en armes prêts à défendre le pays contre une improbable invasion... Mais la nuit et la probable exagération de mon imagination font que je ne vois rien de tel : des barrières bien sûr mais rien de plus. Ici, une sorte de petite caserne, quelques véhicules militaires, rien de plus.

Puis, vient l'Arche de Lumière.

 

L'Arche de Lumière

Ce qui marque notre arrivée en Chine, c'est comme si on avait allumé la lumière. En fait, c'est ça d'ailleurs. De nombreux bâtiments richement éclairés, une grande arche lumineuse, un panneau lumineux proclame fièrement "Welcome To China". Je ne suis pas allé à Las Vegas, mais j'imagine que le choc visuel doit être du même ordre : passer d'un pauvre bled paumé et poussiéreux à un déluge de couleurs et un étalage de puissance. Bel accueil, beaux visuels. Ces gars-là savent s'y prendre.

Encore que...

 

Repartez d'où vous venez !

Quelques minutes après, on arrive dans un gare. Nous sommes à Erlian, d'après ce que je lis sur la façade. Le train s'arrête. Des gardes Chinois sont postés à intervalles réguliers, au garde-à-vous, sur le quai. Lequel est impeccable, pas un papier, pas un objet ne traîne. Les lampadaires ne sont plus des poteaux avec une lampe mais de vrais lampadaires ouvragés. Laids, mais on sent que là aussi un effort a été fait. Des hauts-parleurs diffusent une marche militaire. Puis tout à coup, venant de nulle part, une voix nous donne des consignes --vu le ton, parce que c'est en Chinois puis dans un Anglais tellement mal prononcé que je n'y comprends pas grand chose-- et je suppose qu'on égrenne nos droits. Mais visiblement il faut rester dans les wagons, on attend. De nouveau, on nous contrôle. Puis le train repart en marche arrière.

changement d'essieux pour entrer en  ChineComment ça ? On aurait donc raté notre examen de passage, et on nous renvoie en Mongolie ? Non, bien sûr que non. On va changer les essieux.

Explications pour ceux qui n'ont pas été bercé par cette délectable curiosité qu'est le changement d'essieux. La Russie et ses anciens amis dont la Mongolie, ont des voies ferrées dont l'écartement est plus grand que le reste du continent. Du coup, les trains Russes ou Mongols ne peuvent pas aller en France ou en Chine sans un ajustement des essieux. Le grand bâtiment dans lequel notre train s'engouffre par à-coups violents est là pour cette opération qui se fait de la manière suivante : les wagons sont séparés les uns des autres, puis soulevés par d'énormes verrins hydrauliques; ensuite, des petits travailleurs Chinois viennent sous le wagon pour détacher les boggies puis les pousser vers le bout de bâtiment par un système de câbles; ensuite d'autres boggies arrivent de l'autre bout, et sont refixées aux wagons, lesquels sont en fait juste posés dessus et tenus par un système de piton qui se fiche dans un trou : simple et efficace. Enfin, le wagon est donc reposé et on rattache le tout. Durée totale de l'opération pour un train entier, avec ses petits passagers agglutinés aux fenêtres pour bien voir le spectacle --qui est impressionnant, il faut l'avouer-- et pour mitrailler de photos la scène : une heure. Sur la photo, observez le Garde Rouge qui surveille la scène.

Vous doutiez encore de l'efficacité chinoise ? Mon pauvre, et là ils prenaient leur temps !

changement des essieux : le hangarC'est sûr qu'en arrivant de Russie et de Mongolie, on aurait pû s'habituer à un rythme de travail plutôt calme et tranquille --encore que j'ai vu des travaux routiers et des ouvriers dans des chantiers en 3x8 à Moscou comme à Oulan-Baator-- mais là, on prend une claque. Et on repense à ces phrases qui semblent creuses : "la Chine est discipline et efficacité", etc. Aïe, on va prendre cher les gars !

Notre train a donc fini de jouer aux voltigeurs, on repart en avant et nous revoilà dans la gare d'Erlian, avec les mêmes gardes Chinois au garde-à-vous. Le train s'arrête, la musique aussi. Les gardes se regroupent et s'éloignent. Des passagers commencent à descendre. Je demande à notre responsable de wagon --un homme, je ne sais plus si je vous avais dit qu'on avait toujours eu des femmes jusqu'ici-- combien de temps on a avant de repartir. Deux heures.

Je descends, et avec Seb on va faire un tour. Opération découverte, et si possible on cherchera un W-C. Bin oui, vous voyez, ça fait plusieurs heures qu'on est dans notre train à avancer-reculer et donc avec les toilettes fermées, alors comment dire... ça devient critique.

 

Souvenirs d'Erlian

Erlian a une gare assez grosse, genre aéroport. Un hall avec des dizaines de petites plantes en pot, il paraît que c'est un symbole de bienvenue. L'endroit est désert.

On trouve, devant la gare, quelques mini-boutiques qui proposent tout et n'importe quoi, surtout de la nourriture. Bien évidemment, tout est écrit en Chinois, et donc l'évaluation du contenu est plus que difficile.

**mode romancé ON**

Retour à la gare pour y trouver les toilettes. La porte passée, un doute nous étreint. Une sorte d'angoisse sourde, du genre qui vous prévient que quelque chose de terrible va arriver. Mais pourtant, on persiste. Seb ouvre la porte d'une cabine W-C pour y entrer. Et là, c'est le drame.

**mode romancé OFF**

Bon d'accord, deux drames en une page, c'est pas crédible. Mais là, il faut que je vous décrive la scène : une véritable explosion de déjections. De la merde sur les murs jusqu'à une hauteur telle qu'on se demande comment on a pu arriver à un tel résultat. Une odeur à faire frémir les plus endurcis des aires d'autoroute. Une vision de cauchemar, franchement j'ai pourtant déjà vu des trucs dégueulasses mais là on dépasse le tout et de très loin.

Je vous rassure tout de suite, je n'ai pas revu ce genre d'horreur en Chine. C'est donc pour moi un cas isolé, mais je vous avoue qu'en pleine soirée, après plusieurs heures d'attente, on se retient quand même et on sort en se retenant de vomir.

A part ça, Erlian nous offre la vision d'une avenue avec des espèces d'arbres à lumière, mélange incongru de lampes à économie d'énergie par dizaines sur des supports façon lustre des années '80, le tout en bordure d'avenue et motif répété sur dix mètres de haut, sur des centaines de mètres de long. Je n'ai pas de photo, c'est dommage.

Allez, on retourne au train pour tester nos quelques "produits régionnaux". On retrouve les autres dont la moitié est paniquée à l'idée que l'autre moitié (nous) pourrait être resté sur le quai alors que le train repartait. Il faut dire à notre décharge que pendant notre innocente balade dans les entrailles de l'horreur, la moitié du train a été déplacée avec ses occupants, sans que le motif de ce décrochage-raccrochage soit parfaitement clair pour moi. Mais les occupants, c'était les autres du groupe. CQFD.

Le train repart. On grignotte, bouquin, dodo. Demain, nous arriverons à Pékin.

 

 Voir de nombreux clichés d'Erlian dans l'album photos complet du Transsibérien

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