Zone interdite : rencontre spéciale
Avant de partir dans la zone interdite, nous faisons quelques courses au marché d’Ölgii. C’est, comme tous les marchés en Mongolie, un petit monde grouillant et avenant. On y trouve de tout, de la bassine plastique aux draps en passant par les moteurs et bien sûr tout ce qui se mange ou se boit. Un petit tour aux douches municipales (le niveau est le même que précédemment), un petit resto kazakh et en route piste !
Tout d’abord, nous essuyons une petite tempête de sable ! La piste monte, tortille, on fait une première halte à 2510m d’altitude, dans une famille nomade que Bida connaît. Nous sommes accueillis pour la nuit dans une yourte posée là, et donc en pente ! Il y a un bon mètre de dénivelé entre un côté et l’autre, pour un diamètre d’environ 5m, les matheux calculeront le pourcentage d’inclinaison !
Une fois de plus, que dire du paysage épatant qui s’offre à nous. Un alpage en déversoir, avec son petit torrent d’eau fraîche. Et alors que tout se présente pour le mieux, c’est le drame.
Le drame. Oui, un vrai. L’UAZ est garé en travers de la pente, les roues calées par des pierres. La porte côté amont est ouverte par une personne. Qui entre dans le véhicule pour y prendre quelque objet. Et qui oublie que la pesanteur faisant son effet, la porte claque sur les doigts de l’infortunée. Sauf qu’une portière d’UAZ, c’est lourd. C’est de la bonne tôle d’acier soviétique, c’est solide, mais c’est lourd.
Et la victime est donc Audrey, qui (heureusement) s’en sort sans rien de cassé, mais avec une belle frayeur. Ouf ! Allez, une photo pour le souvenir et maintenant tout va bien ! On profite donc du coucher de soleil pour faire quelques jolies photos. Les nomades sont partis chercher le troupeau : ce soir on nous prépare un repas de fête. Bida fait des cadeaux aux enfants de la famille. Eve fait des sculptures sur ballons : on avait prévu le coup, on a emporté des ballons à sculpter et une petite pompe, et à chaque fois qu’il y a des petits enfants (dans le train, dans une yourte, etc) Eve fait un petit chien en ballon et l’offre, ça fait plaisir et surtout ça ne donne pas l’impression de supériorité qu’on aurait à donner autre chose. J’avais lu ici et là que certains touristes offrent des stylos ou je ne sais quoi, c’est au mieux condescendant. Ces personnes que nous croisons ne sont pas pauvres, elles ont choisi ce mode de vie nomade, nous plaçons juste l’argent et son usage à des niveaux différents, mais ils sont capables d’acheter une voiture neuve quand ils veulent, leur troupeau vaut largement le prix d’une maison.
Bien sûr la Mongolie est un pays moins riche que la France, mais en version locale un nomade est clairement aussi riche qu’un citadin, sauf qu’il a la liberté en plus. Donc, tout ça pour dire, le coup des sculptures sur ballons, ça a marché à fond parce que ça, c’est pas juste un ballon, c’est un savoir-faire, qui est exécuté devant eux. Un peu comme si un magicien vient chez vous, et vous fait un petit tour avant de passer à table. C’est vraiment agréable, non ?
Au cours du dîner, on nous fait goûter au yoghourt de yak. A titre personnel, j’ai beaucoup aimé, ça n’est pas acide du tout contrairement au fromage qu’ils font, et il y a bien longtemps qu’on n’a plus mangé un yaourt, nous ! On discute un peu avant de se coucher. Le monsieur de la famille exhibe fièrement ses fusils, et me les fait manipuler (je vous rassure, on ne tire pas, les cartouches sont pour la chasse). Ce sont de belles armes, mais qui sont visiblement déjà assez âgées pour que la crosse ait été changée, et le canon scié sur l’une des deux carabines.
La nuit est glaciale. Heureusement qu’on a nos sacs à viande et qu’on est tous dans la même yourte. Pour rester à plat, il y a des pierres sous les pieds de la table et des lits de la famille (enfin, du côté en bas seulement !) et dès le matin nous reprenons la piste, on passe un col à 2777 m d’altitude (ça ne s’invente pas), pause à midi en pleine zone vierge, mais ça n’empêche pas une famille nomade au complet de venir nous voir, comme on regarde une curiosité. Puis de repartir aussi simplement.
La piste tortille, on traverse des plateaux et des vallées, puis nous arrivons au bout d’une vallée entourée d’immenses montagnes.
D’après le GPS, la Russie est juste derrière cette montagne, nous en sommes à moins de 10km « à vol d’oiseau » (mais l’UAZ ne vole pas). On s’arrête au niveau d’une yourte. Je sens qu’il y a un truc étrange, car Iggy et Bida se regardent puis vont causer avec les nomades. Un panneau pour le moins insolite indique qu’une de leurs yourtes est là pour les touristes (c’est la seule fois que j’ai vu ce panneau en Mongolie). J’avais bien repéré qu’il y avait un problème, et donc, vu leur mine déconfite au bout de quelques échanges avec les nomades, on nous annonce le drame !
Vous aussi vous avez deviné ? On apprend que nous ne sommes pas dans la bonne vallée ! Il faut donc rebrousser chemin, et le kazakh qui nous l’annonce est plutôt rougeaud (voir la photo en haut de l’article). Donc, on prend notre courage à deux mains (pour Iggy : une sur le volant, l’autre sur le levier de vitesse) et on repart pour 2h30 de piste supplémentaire. Le hic, c’est qu’on est déjà sur la réserve. Heureusement, il nous reste un bidon d’essence de 20L. Mais dans la zone interdite il n’y a quasiment personne, et donc pas de village (donc pas de pompe à essence). Il faudra donc optimiser notre trajet ! Du coup, on prend un raccourci via le « pont de la mort ». C’est un pont en bois… Voyez plutôt la vidéo !
L’eau glacée qui coule furieusement sous le pont provient des gros glaciers et des montagnes (qu’on aperçoit à l’arrière plan sur la photo). Le soleil d’automne commence à décliner, car le temps s’écoule aussi sûrement que l’eau du torrent, on espère arriver bientôt à destination. En fait, nous arrivons sur place à la nuit tombée : à la frontière du parc national, où un panneau (en anglais) nous rappelle qu’il faut un permis pour arriver ici.
D’ailleurs, 100m plus loin, un petit poste de contrôle nous attend. Juste à côté du contrôle, il y a plusieurs yourtes, on s’installe donc ici mais impossible de trouver des propriétaires, il n’y a personne, tout est vide. On choisit donc une yourte et on s’y installe comme si c’était chez nous. On verra demain si on trouve les propriétaires ! En attendant, il fait nuit, il y a du vent, donc on s’installe. Et ça ne rate pas, les militaires débarquent dans le quart d’heure qui suit, pour vérifier les passeports et les permis. Ouf, on est dans les règles ! On va bien dormir cette nuit.
Et au réveil, le paysage est, encore une fois, à couper le souffle. De gauche à droite : le 4×4 des nomades (qui sont arrivés ce matin), un chameau et des chevaux, la bicoque des militaires, et à l’arrière plan : les montagnes avec le mont Khuiten, plus haut sommet de Mongolie et également frontière avec la Russie, à 4373 m d’altitude. Et plein de neige, bien sûr. Ah, ça valait le coup de venir et de faire les formalités, bref comme on dit pour trois étoiles au Michelin : « vaut le voyage ». Je confirme.
Aujourd’hui, on reprend la piste pour aller rejoindre une famille nomade qui a pris son camp d’hiver. Je vous raconterai ça dans un prochain post !
5 réflexions sur « Zone interdite : rencontre spéciale »
J’espère qu’Audrey a intégralement récupéré son doigt !
Quelles aventures 🙂
Bises à toutes et tous !
Oui, tout va bien ! Juste une grosse frayeur !
:))
Oh Olivier s est laissé pousser la barbe !
COPAING !!!
ça fait un petit moment que je ne vous avais pas suivi ! paysages incroyables mais que d’aventures…. j’espère que vous êtes tous en forme dans ce grand périple.
Bisous
Catherine Christian
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